Les chrétiens ont-ils encore quelque chose à dire et à vivre ?

Prédication du Pasteur Simon Wiblé, le dimanche 25 décembre 2022

Il peut vous paraître surprenant que je pose cette question le jour de Noël. Après tout, Noël est une fête extrêmement populaire, dont la dimension religieuse subsiste. Même en Région parisienne, sur le parvis de la Défense, au cœur de la civilisation marchande et financière, le « marché de Noël » résonne du son des cantiques. De même, la Bible reste l’un des livres les plus vendus. Enfin, chaque année, les grandes chaînes de télévision nous proposent des films sur la vie de Jésus. On l’aime pour sa sagesse et son message d’amour, on est même prêt à reconnaître qu’en affirmant l’égale dignité de tous devant Dieu, il a posé l’un des fondements des droits de l’homme.

Pourtant, la question de la pertinence du christianisme – et à plus forte raison des Églises – nous est quotidiennement posée. Les religions sont soupçonnées d’entretenir l’obscurantisme, la misogynie et surtout la violence. Des penseurs estiment que le problème intégriste ne vient pas seulement d’un petit noyau de fanatiques mais de la religion, elle-même, quelle qu’elle soit.

La Bible est un succès de librairie mais, le plus souvent, elle est achetée et lue comme une œuvre littéraire et historique, non comme le témoin de la Parole de Dieu.

Quant aux Églises, elles sont accusées d’avoir trahi l’Évangile, culpabilisé des générations de croyants et sanctifié l’impérialisme occidental. Plus grave encore, si elles ne font plus « recette », c’est parce qu’elles n’auraient plus grand chose à dire. Des pans entiers de leur doctrine ne seraient plus opérants aujourd’hui.

Enfin, si Jésus a sa place au panthéon des grands hommes, à côté de Bouddha ou du Dalaï-Lama, des expressions comme « Fils de Dieu », « Christ » ou « Messie » ne résonnent plus vraiment aux oreilles de nos contemporains.

Alors, en ce jour de Noël, quelle bonne nouvelle pouvons-nous recevoir et transmettre ? Quel est le cœur de nos convictions ? De notre foi ?

 

« La Parole a été faite chair (s’est incarnée) …

Elle a habité parmi nous (fait sa demeure, planté sa tente)

La Parole était la véritable lumière qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme.

Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle.

 

En rendant compte de l’incarnation, et en l’exprimant symboliquement, Jean atteint l’essentiel. Cet essentiel évangélique n’est ni une morale, ni une sagesse, encore moins un corpus de rites ou de dogmes ; c’est une bonne nouvelle : par Jésus, la lumière est venue dans le monde pour que nous devenions, à notre tour, lumineux. C’est, je le crois, cette bonne nouvelle, que nous pouvons recevoir, aimer et transmettre.

Premier versant de la bonne nouvelle : en Jésus, la lumière est venue dans le monde.

En assimilant Jésus à la lumière, Jean utilise un symbole universel : celui de la lumière qui brise l’obscurité. Il reprend également une image chère au peuple juif. Car, dans le Premier Testament, la lumière n’est rien d’autre que la Parole de Dieu. Cette Parole a créé l’univers, elle s’est adressée aux grands hommes du peuple juif, elle a guéri, redressé, redonné vie. Ainsi, en annonçant d’emblée que Jésus est la lumière venue dans le monde, Jean proclame que Jésus est la Parole incarnée, la Parole « en chair et en os ».

Noël est la célébration de cette bonne nouvelle : la Parole de Dieu est au milieu de nous, la Parole de Dieu est en nous. Cette bonne nouvelle n’est pas théorique. Elle a une dimension tout à fait existentielle, c’est-à-dire qui concerne notre existence. Par l’image de la lumière, Jean nous aide à le comprendre.

Vous le savez aussi bien que moi, la lumière a une triple fonction : elle permet de se repérer, d’éclairer les autres et de vivre. Proclamer que Jésus est la lumière, c’est donc proclamer que Jésus voit clair, guide et donne la vie.

D’abord, Jésus voit clair sur Dieu.

Par eux-mêmes, les hommes imaginent des dieux qui leur ressemblent étrangement et qui incarnent un aspect de leur vie ou de leurs sentiments. C’est ainsi que les Grecs et les Romains célébraient les dieux de la guerre, de l’amour, de la justice.

Les juifs et les chrétiens confessent que Dieu est unique, mais ils ont parfois cédé à la tentation de projeter sur lui leurs désirs, préjugés ou fantasmes.

Suivant les époques, ils ont cru en un Dieu juge, nationaliste, guerrier ou, au contraire, dans des époques moins ferventes et plus consensuelles, ils l’ont réduit à une fonction d’horloger ou à une réserve d’amour, généreuse mais sans grand effet. Comme l’écrivait Voltaire, ce n’est pas Dieu qui a créé l’homme à son image, c’est plutôt l’homme qui s’est forgé un Dieu à son image. Dans un livre d’ailleurs passionnant, « Dieu, un itinéraire », Régis Debray a écrit une « histoire de Dieu » qui n’est rien d’autre que l’histoire des représentations que l’homme lui donne. Ainsi, spontanément, nous projetons au ciel le Dieu de nos désirs, de nos peurs, de nos idéaux ou de nos frustrations.

Parce qu’il est lumière, Jésus voit clair sur Dieu.

Il sait que Dieu est un Père qui attend le retour de son enfant, un chercheur de perles, un semeur qui espère en la fertilité de chaque terrain, même improbable. Il peut donc nous guider dans la connaissance de Dieu.

C’est ce qu’il fait auprès de ceux qu’il rencontre.

À la femme adultère qui se croit définitivement condamnée par les hommes et par Dieu, il met en lumière le pardon divin et l’interdiction pour tout humain de condamner sans appel.
Au jeune homme riche qui se croit proche de Dieu parce qu’il respecte ses commandements, Jésus met en lumière l’exigence divine et la nécessité de se débarrasser de ce qui nous empêche de le suivre.
À l’aveugle et aux disciples qui voient dans le handicap physique une punition divine, Jésus dissocie la souffrance et la faute et annonce un Dieu qui rend clairvoyant.

Bien des qualificatifs sont accolés à Jésus : Sauveur, Seigneur etc. …

Ici, Jésus est célébré comme « révélateur » de Dieu. « Nul n’a jamais vu Dieu » écrit Jean, « mais le Fils unique, qui est Dieu et qui vit auprès du Père, nous la fait connaître ». En ce jour de Noël, nous pouvons nous réjouir, parce qu’enfin, Dieu nous est révélé.

Jésus voit clair, Jésus éclaire ; Jésus fait vivre. La lumière est à l’origine de la vie. C’est vrai dans la nature : sans lumière, la plupart des organismes vivants disparaissent.

C’est également vrai spirituellement. Comme la lumière donne la vie, Jésus nous communique la vie éternelle, c’est-à-dire une vie, au cours de laquelle, dès aujourd’hui, nous sommes accompagnés, fortifiés et aimés, sauvés. En recentrant notre vie sur le Christ, sur son message, sa foi, sa confiance, en suivant son chemin pour rencontrer le Père, nous recevons de lui une vie renouvelée. De même que les plantes et les arbres poussent naturellement dans la direction de la lumière, puisse notre vie s’orienter vers la lumière de Dieu ! Ainsi, parce que Jésus est lumière, il voit clair, nous guide et nourrit notre croissance. Il fait même davantage : des êtres lumineux.

Oui, par Jésus, votre lumière, vous êtes éclairés afin de devenir, à votre tour, lumière.

Frères et sœurs, parce que vous avez reçu cette lumière, vous pouvez devenir lumineux. Alors, transmettez la Parole de Dieu, en paroles, en faisant connaître le Dieu de Jésus-Christ ! Transmettez la Parole de Dieu par des actes inspirés de l’Évangile, des actes de paix et de partage !

 

Petit exemple : Esaïe 52, 7 « le messager de bonnes nouvelles »

A la fin du culte, carte avec verset biblique sous enveloppe.

Pourquoi ne pas l’adresser à quelqu’un à qui vous savez que cela lui fera du bien ?

 

Je vous rappelle la question posée : Les chrétiens ont-ils encore quelque chose à dire et à vivre ? Le prologue de Jean nous permet de répondre : oui, les chrétiens ont quelque chose à dire et à vivre ! Parce que nous croyons que Jésus est la lumière, parce que cette lumière est au milieu de nous, nous éclaire et nourrit notre croissance intérieure, nous pouvons devenir des êtres clair voyants.

Que Dieu creuse en nous le désir de lire la Bible pour y discerner la Parole vivante de Dieu : Jésus-Christ, notre Seigneur, notre Sauveur, notre frère.

Amen !

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