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Pour la deuxième fois, Jésus annonce à ses disciples sa mort et sa résurrection. (v. 31)
Et que font-ils ? Ils discutent pour savoir qui est le plus grand. (v. 34)
Jésus les invite alors à voir autrement.
Il plaide (alors) pour un esprit de service. (v. 35)
Pour illustrer son enseignement, il place un enfant au milieu d’eux et leur parle de l’accueil. Un accueil qui laisse la place à l’autre. (v. 36 et 37)
Plan :
- Voir autrement
- Ce propos est illustré par un geste fort de sens : placer un enfant au milieu des 12
- Pour un esprit de service
Voir autrement
Le projet de Jésus c’est de guérir les regards, éloigner les peurs, renverser les systèmes de valeur.
Alors que fait-il ?
Il prend un petit enfant, le place au milieu des grands, des adultes, et il le montre en exemple. C’est une parabole vivante. Devant la faiblesse de ses disciples, Jésus ne se met pas en colère.
Observons sa façon d’agir : il s’assied, appelle les Douze et leur parle avec amour. Il part de leur désir : Si quelqu’un veut être le premier. Il les place devant leur liberté tout en les invitant à un total renversement de leur échelle de valeurs. Il s’agit de cesser de penser à la manière des hommes pour apprendre à penser à la manière de Dieu.
Le petit est grand, le faible est fort, le fou est sage, la victime triomphe de la mort.
Pour être premier dans le cœur de Dieu, il importe d’être le dernier de tous et le serviteur de tous. C’est ce que Jésus fera lui-même en mourant sur la croix. Si nous nous imprégnons de la pensée de l’évangile de Marc, nous sommes amenés à voir autrement les discussions concernant la question du plus grand.
Savoir qui est le premier …
Au temps de Jésus, nous pouvons détecter la source de l’incompréhension des apôtres : ils rêvaient d’un état d’Israël fort, libre et stable. Jésus cristallisait l’espoir de tout un peuple de se dégager du joug de la puissance romaine.
Le désir d’être le plus grand répond aussi à une tendance universelle. Il prolonge en société la réaction naturelle d’organisation et de maîtrise de la nature. Il est indispensable à notre développement et à notre épanouissement personnel.
Dès notre naissance, nous disposons de talents qu’il importe de faire fructifier. Pourtant cette tendance se transforme facilement en un exercice de puissance.
Le mal consiste à vouloir construire notre grandeur en écrasant ou en asservissant l’humanité de celles et ceux que nous approchons. C’est là que l’exemple de Jésus éclaire une autre route, celle qui consiste à faire exister les autres, à travailler pour qu’ils progressent.
Voir autrement et pour illustrer cela, appuyer son propos, un geste …
Un enfant au milieu
C’est ici qu’arrive la place centrale de l’enfant. Le mot utilisé ici évoque non pas le tout-petit mais le préado, le garçon de 7 à 12 ans.
L’enfant ne représentait en aucune façon le modèle de l’innocence et de la simplicité qu’il peut évoquer dans nos pensées actuelles. Il n’avait tout simplement pas le droit à la parole, il ne pouvait ni témoigner, ni assister aux procès, il était pour ainsi dire insignifiant et ne tenait guère de place dans les sociétés anciennes. Ainsi les rabbins leur accordaient peu d’estime, car les enfants ne pouvaient pas appliquer les préceptes de la Loi, faute de les connaître.
La Loi juive recommandait cependant d’accueillir les enfants et beaucoup pratiquaient cette œuvre de charité, il s’agissait de les accueillir au titre de « pauvres », enfants orphelins ou enfants des rues risquant d’être délaissés ou maltraités. Jésus se différencie de ses contemporains en raison de la portée qu’il va donner à son exemple.
Ici, ce jeune garçon est à un point de passage de sa croissance.
C’est le moment qui marque la traversée de l’adolescence avant que ne soit atteinte sa stature adulte.
« Accueillir un enfant » c’est accueillir Dieu non seulement en tant que défenseur des petits et des pauvres, mais c’est accueillir le fils de Dieu dans ce point de passage entre la mort et la résurrection, l’entrée dans sa nouvelle vie.
Le comportement des parents à la naissance de leur enfant peut être un bon exemple pour éclairer l’annonce par Jésus de sa passion et de sa résurrection.
Jean l’évoquera dans le Discours après la Cène : (Jn 16 v21)« A la naissance, la femme oublie ses douleurs dans la joie qu’un homme soit venu au monde ».
Nous le savons, accueillir un ado n’est pas chose facile, tout est tellement délicat, sujet de tensions, de craintes et d’espoirs. Accepter que Jésus soit livré à la cruauté des hommes et soit mystérieusement ressuscité est également hors de l’entendement humain.
Jésus place cet enfant au milieu du cercle formé par son groupe, c’est à dire à égale distance de chacun de ses disciples. Lui-même, embrassant l’enfant, se situe au milieu de ce cercle.
- Voir autrement
- Placer un enfant au milieu des disciples
- …
Un esprit de service
Plusieurs fois Jésus a déclaré que le Royaume est au milieu de nous, lui-même se déclare au milieu de nous, à égale distance de chacun.
Il n’y a pas certains qui seraient plus proches, plus privilégiés, plus en avance que les autres, voire supérieurs aux autres, nous sommes égaux devant le Seigneur ne pouvant nous targuer ni de notre intelligence, ni de notre ancienneté à son service, ni de notre curriculum vitae.
Nous sommes appelés à trouver notre bonheur dans la simplicité du service bien fait.
Saviez-vous qui était JFK ? John Fitzgerald Kennedy, dans son discours d’investiture à la Maison Blanche en Janvier 1961, disait :
ne vous demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais demandez-vous ce que vous pouvez faire pour votre pays.
Dans cette citation, remplacez « pays » par « Eglise », « Dieu », ou encore « votre prochain ».
Oui, un esprit de service et de disponibilité.
Sans chercher à paraître meilleurs que nous ne sommes.
Accepter ce cadeau que le Seigneur nous fait, il se laisse accueillir, il se rend présent au milieu de nous.
Il n’est pas inaccessible au point que nous aurions à monter les uns sur les épaules des autres pour être le premier, le plus grand :
Quiconque accueille en mon nom un de ces petits enfants m’accueille moi-même ; et quiconque m’accueille, accueille non pas moi, mais celui qui m’a envoyé.
Alors, où situer le bonheur, le royaume, la bonne nouvelle ?
Le bonheur n’est pas inaccessible. Il n’est pas au bout d’une échelle, pour atteindre le ciel.
Sur le chemin Jésus parle, sur le chemin nous progressons, nous grandissons en force et en sagesse, nous ouvrons les yeux, nous ouvrons nos oreilles et, à l’étape Jésus s’assied, au milieu de nous, et tout devient clair.
C’est cette présence qui peut nous rendre heureux, humains, libérés de nos soucis et de nos peurs.
Le bonheur ?
En vérité, il n’est pas au bout du monde,
il n’y a qu’à se baisser pour le cueillir,
Le bonheur ?
il est là, au milieu de nous ; présence vivante sur le chemin.
Amen !
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