Dieu nous a donné le ministère de la réconciliation

 

Ça y est !
Dieu a mis son arc-en-ciel dans la nuée, Dieu a placé son Fils, le Christ au cœur même du péché et de la mort, comme signe et réalité d’une alliance éternelle.

Ça y est !
C’est fait, nous avons été réconciliés avec Dieu par la crucifixion et la résurrection de Jésus-Christ et quelle que soit la théologie à travers laquelle nous comprenons le cœur de la foi chrétienne, il est clair, en lisant le Nouveau Testament, que, oui, ceci est accompli une fois pour toutes.

Pourquoi alors prêcher sur la réconciliation ?
Quel est le sens de l’exhortation que Paul écrivait à nos frères et sœurs d’autrefois à Corinthe ?
C’est bien ce que nous allons tenter de comprendre maintenant, sans perdre de vue ce que nous savons par ailleurs, je veux dire le caractère parfait de la réconciliation acquise en Jésus-Christ.

Retenez donc bien ce qui constitue la première phrase de l’extrait que nous avons entendu : « Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature ».

Paul ne s’adresse évidemment qu’aux gens qui l’écoutent, à des hommes et à des femmes comme vous, des chrétiens, quel que soit leur rang dans la société, quelle que soit leur place dans l’Eglise. Paul ne s’adresse qu’à des gens qui « sont en Christ », qu’à des gens qui, oui, sont bel et bien de nouvelles créatures. Car, mes frères et sœurs, voilà ce que vous êtes ! Alors, ne l’oubliez jamais, vous êtes des créatures d’un nouveau genre. Rappelez-vous toujours que, en vous, tout ce qui est ancien est passé, tout ce qui date de la rupture avec Dieu, tout ce qui est né du péché et qui en retour entretient le péché, tout ce qui est du diable et qui pourrait réjouir l’Accusateur, tout cela n’a plus aucune actualité au regard de Dieu.
L’Accusateur lui-même n’a plus sa place au ciel, et Dieu ne l’écoute plus.
Alors, quant à vous, ne l’écoutez pas non plus !
Dieu ne considère plus en vous que ce qui est à Christ, que ce qui est à lui, que ce qui est nouveau ?
C’est le sens de la première des deux exhortations que nous retiendrons ce matin : « Soyez réconciliés avec Dieu »
Non pas que ce soit à faire, à construire, je vous l’ai dit !
Mais ce qui est vrai pour Dieu met souvent un certain temps à l’être pour nous…Croyez-vous vraiment à cette réconciliation achevée ? Vos existences quotidiennes sont-elles vraiment basées sur cette certitude d’être une créature nouvelle, refaite totalement à neuf ?
Vivez-vous à chaque minute comme étant en pleine communion avec le Seigneur de l’univers, avec celui qui, en son Fils, a donné sa vie pour vous ?

Les réponses naturelles, naturellement hésitantes ou négatives, à toutes ces questions, disent bien la nécessité de l’exhortation apostolique. Nous avons besoin, tous, laïques ou ministres, hommes ou femmes, jeunes ou vieux, nous avons besoin de nous replacer sans cesse devant le don de Dieu pour mesurer ce qui nous sépare de sa pleine appropriation.

Nous sommes trop timides devant Dieu, voilà le hic !

Nous n’osons pas croire qu’il a franchi, lui seul, toute la largeur du fossé. Nous nous complaisons dans la tristesse de notre péché, de notre incapacité, quand Dieu, lui, veut ôter toute tristesse de nos cœurs, comme il a déjà ôté tout péché de sa vue. Nous sommes trop timides… Nous composons avec notre péché, parce que nous croyons qu’il est encore là ! Nous hésitons à vivre la pleine communion avec Dieu, et nous trouvons en nous toutes les bonnes raisons pour ça.

Mais justement, ces raisons-là, Dieu les a écartées !

Ne dites plus « Je suis trop jeune » ou bien « Je suis trop vieux », ne dites plus « Je ne suis pas assez pieux » ou bien « Je ne sais pas prier », ne pensez plus « Avec ce que j’ai fait » ni même « Avec ce que je n’ai pas su faire »…!

Ce que Dieu a fait nous suffit, c’est sa grâce et non notre mérite…

Alors, oui, dans la vie de tous les jours — je ne parle pas du culte ou de la prière —, là où vous vivez les uns et les autres, dans les situations bien concrètes que vous traversez, bonheur ou peine, travail ou solitude, engagement ou délassement, qui que vous soyez, quoi que vous fassiez, quels que soient les gens avec qui vous vivez ou avec qui vous n’arrivez pas à vivre, « laissez-vous réconcilier avec Dieu », vivez avec au cœur la certitude d’être devant Dieu une créature toute neuve, toute belle, toute renouvelée. Et alors, vous saisirez sans problème l’autre exhortation paulinienne que nous entendons ce matin, et qui en est comme la suite logique « Dieu nous a donné le ministère de la réconciliation ».

Là encore, vous l’entendez bien, c’est plus une certitude qu’une exhortation, c’est la connaissance de ce à quoi nous sommes appelés. Réconciliés avec Dieu, il nous faut alors annoncer cette réconciliation. Et je ne parle pas là d’un ministère ecclésiastique, même si cela en fait naturellement partie. Non, plus profondément, c’est du ministère de chaque chrétien, je veux dire du sacerdoce de chaque chrétien, de chaque baptisé, qu’il soit bon ou mauvais, qu’il soit laïque ou ministre, encore une fois.

Si tu te sais réconcilié avec Dieu, alors ce que tu vis peut devenir témoignage, tu peux devenir messager, serviteur de cette réconciliation pour les autres, messager de bonne nouvelle. Devenez donc des anges, pour annoncer les merveilles de Dieu, pour annoncer sa réconciliation ! Et ne vous faites pas trop de souci pour savoir quelle stratégie vous allez devoir déployer pour ce faire. Si vous vous savez réconciliés avec Dieu, alors vous savez aussi que tout ce qui compte pour vous, tout ce qui donne sens à votre vie, c’est Christ.

Vous savez qu’il n’y a au monde plus aucun autre Seigneur devant qui se prosterner, au profit de qui abdiquer votre liberté.

Serviteurs et servantes de Christ, vous êtes libres de tout le reste.

Ne soyez donc plus attachés à ce qui ne vous est plus rien.

Et si l’on veut vous prendre, donnez !

Si l’on veut vous forcer, marchez !

Si l’on veut même vous détruire, que risquez-vous ?

Vous êtes déjà ressuscités avec Christ !

C’est ainsi, oui, c’est bien ainsi, que vous serez ambassadeurs de la réconciliation, en étant images de Dieu, en offrant ce qu’on croyait vous prendre, en disant la vie à ceux et celles qui respirent la mort, en bénissant ceux qui vous maudissent.

Frères et sœurs, ces exhortations sont difficiles à vivre, et je ne suis pas le dernier à en être conscient et dépité : je n’y arrive pas mieux dans ma propre vie que, sans doute, vous dans la vôtre ! Mais c’est parce que je ne réalise pas vraiment la grandeur du salut de Dieu, c’est parce que je ne sais pas vraiment beaucoup profiter de l’amour de Dieu pour moi, de sa compassion et de son aide.

Puisse ce passage de la deuxième épître de Paul aux chrétiens de Corinthe nous aider, vous et moi, chacun pour sa part, à vivre gratuitement une réconciliation qui ne nous a rien coûté, pour que d’autres, nos amis ou nos ennemis, sachent bien qu’à eux aussi elle est offerte, contre rien, comme ça, seulement parce que Dieu les aime, seulement pour leur faire du bien.
Puissions-nous aussi, chrétiens de diverses confessions, montrer à tous que nous sommes unis comme frères et sœurs, parce que Dieu nous a réconciliés en Christ. Et si des frères et des sœurs ont des caractères et des manières de parler et de faire qui sont différentes, qui s’en étonnera, qui s’en plaindra ? Que ce nous soit aux uns et aux autres une richesse devant Dieu et les hommes, plutôt qu’un péché ou une honte !

Car voilà, « Dieu nous a donné le ministère de la réconciliation »
et c’est « comme si Dieu exhortait par nous ».

Le travail, une fois de plus, tout le travail est pour Dieu, et afin que nous en profitions nous aussi, il nous sollicite comme canaux, comme agents de son œuvre à lui.
Réconciliés, c’est lui qui l’a fait.
Réconciliateur, c’est lui qui le fait.
Et nous ?
Ambassadeurs, témoins, serviteurs. Pas plus. Pas moins. Là se tient notre bonheur, notre vocation, notre honneur. Etre simplement transparents à ce que Dieu a fait pour nous en Jésus-Christ, tâchant d’éliminer tout ce qui nous opacifie aux autres.

Puisse l’arc-en-ciel de Dieu briller sans obstacle à travers vos vies, pour que la création toute entière puisse chanter les louanges de Dieu en contemplant en vous son œuvre de réconciliation.

Amen.

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