Comme vous le voyez au nombre de bougies allumées ; nous ne sommes que le deuxième dimanche de l’avent. Nous n’allons donc pas parler aujourd’hui ni de la naissance ni de l’enfance de Jésus- Christ. Et ça tombe bien, puisque que l’évangile de Marc commence après, ou devrais-je dire… pendant ? Car il commence avec la Bonne nouvelle de Jésus Christ. Tout simplement. Tout simplement… Et pourtant ! Dès le début, ce n’est pas si simple. Quelle est cette Bonne nouvelle ? Il va nous falloir lire hâtivement le texte pour la comprendre…
I- Il faut préparer la route au Seigneur !
Jésus n’est pas le grand protagoniste de ce texte. Mais il n’en est pas moins mentionné. Dès le début les choses sont claires ; il s’agit de la bonne nouvelle de Jésus-Christ. Qui est-il ? Le fils de Dieu. Rien que ça. Et il faudra attendre encore un peu pour le voir. C’est donc à un autre, que l’évangéliste Marc laisse le soin de commencer notre histoire.
Jean-Baptiste. Et même si certes, Jean-Baptiste n’est pas le fils de Dieu, il n’empêche qu’il n’est pas non plus n’importe qui. Pourtant… quand on lit le texte, on pourrait avoir l’impression que Jean- Baptiste sort de nulle part. Et avant qu’il ne surgisse, nous avons une citation. Une citation de l’Ancien testament. A-t-elle un rapport avec notre Jean ? À première vue, ce n’est pas évident. C’ est une citation qui vient du prophète Ésaïe, qui est l’un des nombreux, mais surtout l’un des plus grands prophètes de l’Ancien testament.
Donc quand Ésaïe parle, Marc nous dit : c’est Dieu qui parle. Et que dit Dieu alors ? Qu’il envoie d’abord un messager, pour préparer la route du Seigneur.
Qui est ce Seigneur dont il parle ? Pas de faux suspens, il s’agit de son fils Jésus-Christ, Marc nous le dit d’entrée de jeu. Mais pour ce qui est de Jean-Baptiste, son identité, elle, est moins claire. Comment être sûr·e·s qu’il est bien le messager envoyé par Dieu ?
Le texte nous laisse quelques indices. D’abord Jean-Baptiste est vêtu d’un vêtement en poils de chameau. Un peu curieux ou étrange, mais c’est ainsi que s’habillent les prophètes de l’ancien testament. Jean-Baptiste ne serait alors ni plus ni moins que l’un d’entre eux. Mais il a aussi une ceinture de cuir autour de la taille… La même que celle d’Élie. Qui est cet Élie ? Élie aussi, c’est un prophète. Mais Élie non plus, n’est pas n’importe quel prophète. Il est le prophète dont la tradition dit que si il revient, alors cela signifie que le Messie n’est pas loin. Marc en citant, et en nous rappelant ces grands prophètes, institue Jean-Baptiste comme leur successeur, et surtout comme le messager de Dieu. C’est bel et bien lui. Il est envoyé par Dieu, et c’est à lui qu’incombe la mission de préparer le chemin.
Comment ? Comment Jean-Baptiste s’y prend-il pour accomplir sa mission ? Préparer le chemin du Seigneur, on s’en doute, cet n’est sûrement pas une mince affaire… Mais Jean-Baptiste qui a visiblement plus que des sauterelles et du miel sauvage dans son sac, a un plan. Un plan qui semble plutôt simple. Un baptême. Et pour un bon baptême à la Jean-Baptiste il y a deux ingrédients : prenez l’eau d’un fleuve, par exemple le Jourdain ; ajoutez-y une reconnaissance publique de vos péchés, vous plongez sous l’eau – mais pas trop longtemps quand même ! – et vous aurez une conversion, une repentance, disons un vrai changement. Un changement radical d’attitude, de comportement et de coeur. C’est plutôt simple. On peut discuter de l’efficacité, réelle et prouvée de ce genre de procédé… Mais il a au moins le mérite d’être simple.
Encore faut-il savoir ce qu’est le péché. Est-ce qu’il y en a un, est-ce qu’il y en a plusieurs ? Est-ce qu’il y a une liste quelque part qu’on pourrait consulter, juste pour être sûr·e·s de pas en oublier un en route… Marc ne le dit pas, et Jean non plus. Est-ce que si je confesse mes péchés publiquement et que je me fais baptiser, j’ai la garantie de ne plus jamais commettre ces mêmes péchés ? J’ai conscience de m’inscrire dans l’héritage des réformateurs protestants du XVIe siècle quand je dis que : Je doute. Je suis sceptique. Et je crains fort que ce ne soit pas si simple.
Et Jean-Baptiste lui-même a l’air de nuancer son baptême de repentance ; en disant : Après moi, vient celui qui est plus puissant que moi. Celui devant lequel je ne suis même pas digne de m’incliner. Moi je vous baptise d’eau, mais lui vous baptisera d’Esprit-Saint. Jean-Baptiste est-il en train de disqualifier le baptême qu’il propose ? Critique-t-il déjà le plan qu’il proposait pour préparer la venue du Seigneur ?
Pour comprendre si réellement, Jean-Baptiste botte en touche, il faut comprendre quel est ce baptême d’Esprit-Saint dont il parle.
II- Il connaît le chemin
Car, si Jean-Baptiste pose des conditions pour se faire baptiser dans le Jourdain, Il n’en émet aucune en revanche quand il s’agit d’annoncer la venue du Seigneur Jésus-Christ. Il annonce sa venue. Quoi qu’il arrive, Jésus arrive. Marc nous le dit clairement dès le début : Commencement de la Bonne nouvelle de Jésus Christ, fils de Dieu.
Quoi qu’il arrive, Jésus va venir. Quoi que l’on fasse, qu’on plonge dans le Jourdain ou non. Que l’on soit prêt ou non. Jésus arrive, nous dit la Bible. Alors même que nous chantions de préparer sa route, alors même que Jean-Baptiste crie dans le désert : Repentez-vous ! Préparez sa route ! Aplanissez ses sentiers ! Jésus est déjà en chemin. Nous sommes affairé·e·s, en train de réfléchir à nos péchés… Peut-être en train d’essayer de réparer les erreurs qu’on a commises, Ou en train de nous dire en nous-mêmes : « il faut vraiment que je change ». Préparez la route du Seigneur ! Si c’était à prendre au pied de la lettre nous serions en train d’arracher des arbres, de déblayer le terrain, d’évacuer les gravats, et de goudronner une belle route ; bien plate, bien droite. Et alors que vous êtes en train de peindre avec application les petites bandes blanches sur le bitume encore brillant… Jésus passe à côté de votre belle route. Si vous n’avez pas fini de tout débroussailler, ce n’est pas grave ! Il s’en chargera lui-même. Si votre route n’est pas bien droite, il l’aplatira. Même au milieu d’une forêt où vous n’auriez pas arraché un seul arbre, parce que pour des raisons qui vous regardent (et qui sont tout à fait respectables), vous ne voulez pas participer à cette agitation fiévreuse, ni aux travaux haussmaniens pour construire un grand boulevard à Jésus-Christ…Quand bien même tu n’aurais pas soulevé un seul petit gravier. Il trouvera une voie jusqu’à toi. D’ailleurs même au milieu d’un désert aride, il te baptisera, car il n’a même pas besoin d’eau pour ça. Eh oui Jean-Baptiste baptise dans l’eau du Jourdain, pour la repentance et le pardon des péchés. Et Jésus Christ, lui, arrive pour nous baptiser d’Esprit Saint. Pourquoi ? À quelles conditions ? Il n’en dit rien. Il arrive. Nous baptiser. D’Esprit saint. Point.
Questions : Avons-nous au moins le choix ? Pourquoi est-ce Jean-Baptiste qui est choisi comme messager ? Comment Jean-Baptiste peut-il à la fois prêcher un baptême de repentance et la venue de celui qui contredit ce baptême ? Qui en propose un autre. Qui dit : moi, je te baptise. Je ne te demande ni confession de tes péchés, ni même une confession de foi. Tu n’as même pas à dire « tu es le Seigneur baptise moi ». Je suis le Seigneur, je viens vers toi, je viens pour toi et je te baptise.
Un baptême avec un seul ingrédient : l’Esprit-Saint. Un baptême dont seul Dieu a le secret. Un baptême qui ne peut être captif d’aucun élément, pas même de l’eau ; captif d’aucun intermédiaire, plus besoin de Jean-Baptiste, pas besoin de ministre de culte. Simplement Dieu et nous.
III- Il faut préparer une route dans nos cœurs
Et pourtant une question demeure. Que faire de Jean-Baptiste ? Qui nous hurle de nous repentir et de changer pour la venue du Seigneur. Nous serions tenté·e·s de lui dire, avec toute la foi dont nous sommes capables : il arrive ! Nous savons qu’il arrive, nous n’avons pas besoin de l’eau du Jourdain. Et Jean Baptiste lui-même dit : Après moi, vient quelqu’un de plus puissant que moi. Moi je vous baptiste d’eau ; trois fois rien ! Lui vous baptisera d’Esprit-Saint.
Tout dépend, de comment nous lisons deux mots de son annonce… Après moi. Nous pouvons le comprendre hiérarchiquement, et donc verticalement, avec Jean-Baptiste en bas et Jésus en haut. Dans ce cas nous pouvons laisser le baptême de repentance et de pardon des péchés de Jean se noyer dans l’eau du Jourdain. Mais il y a fort à parier qu’il sache nager, et nous pouvons comprendre cet après moi autrement. Chronologiquement. Horizontalement. D’abord le baptême d’eau, puis celui d’Esprit. D’abord le pardon des péchés de Jean, puis le baptême inconditionnel de Jésus-Christ.
Nous nous crispons un peu sur nos bancs… Comment l’amour inconditionnel de Dieu pourrait-il avoir des conditions ? Ne serait-ce qu’une seule condition ? C’est déjà trop. Et c’est vrai ! C’est trop pour se dire sans conditions. Tu viens ou tu ne viens pas, envers et contre tout, me baptiser d’esprit saint. Mais enfin il faut choisir.
Il faut choisir. Et Jean Baptiste nous dit que c’est à nous de choisir. Car Jean-Baptiste est le messager envoyé pour préparer la route du Seigneur. Il est celui envoyé pour aplanir ses sentiers.
Mais pas parce que Dieu aurait besoin d’un chemin, bien droit, pour venir jusqu’à toi . Dieu vient. Il viendra chez toi. Il t’appellera par ton nom, car il te connaît et t’aime déjà. Dieu n’a pas besoin qu’on construise des routes dans le désert. Dieu a besoin d’un chemin jusqu’à nous. C’est dans nos coeurs que Jean nous dit de tracer une route. Comment ? Les trois ingrédients ! Un baptême de repentance, pour le pardon des péchés, dans l’eau.
Tout dépend alors, maintenant, de comment comprendre le mot péché. Mot qui n’existe pas dans la Bible, ni dans ce texte, puisqu’ils ne sont pas écrits en français. Mot, maux ; qui mériteraient un culte entier et une prédication complète, que je ne vais pas vous faire aujourd’hui. Mais laissez moi juste dire sur la base de ce texte et de ce texte seulement ; ce qu’est le péché ici selon moi. Ce n’est a priori pas une liste d’actes immoraux, ou alors si c’est ça… Marc ne la donne pas. Et c’est sans doute pourquoi selon les Églises on a des listes très différentes de ce que sont ou ne sont pas les péchés. Dans ce texte nous avons Jean-Baptiste entre Dieu et nous, qui essaye désespérément de réduire l’écart, de réduire la distance entre nous et Dieu. Car on lui a demandé, on ?! Pas n’importe quel on… Dieu ! Lui a demandé de créer un passage pour lui. Peut-être n’est-ce que ça. Peut-être est-ce tout ça le « péché » ; qu’on pourrait aussi traduire par « la faute ». Péché devant Dieu, fautes entre nous ; peut-être est-ce tout ce qui nous coupe les uns des autres, et tout ce qui nous sépare de Dieu.
Ce sont ces obstacles intérieurs qui l’empêchent de venir jusqu’à nous, alors qu’il est là. Alors qu’il a toujours été là, Et qu’il sera toujours là. C’est à cette distance que s’en prend Jean-Baptiste. Car Dieu arrive, pour te baptiser. Sans condition. Et Jean fait le pari que cela suffira à nous faire faire le dernier pas. Mais rien, ni personne, aucune église, ni même Dieu, ne te forcera à faire ce pas. Dieu marche sur nos routes, il marche dans nos pas. Jusqu’à ce que nous franchissions l’eau pour recevoir son baptême. Un baptême éternel, un baptême inconditionnel. Un baptême de la même eau qu’un Dieu Très-Haut envoie son fils unique dans ce monde, pour nous dire à quel point il nous aime.
Alors quand tu franchiras l’eau, si tu choisis de la franchir, Dieu te baptisera de son Esprit, et ce faisant il confessera son amour pour toi.
Amen.
Laisser un commentaire