Ce passage de l’Évangile que je viens de vous lire, nous plonge au cœur du discours de mission. Il se situe au tournant de la vie publique de Jésus. —— Après avoir prêché « en parole » le Royaume de Dieu aux chapitres 5, 6 et 7 (ce que nous appelons le sermon sur la montagne), Jésus prêche « en acte » aux chapitres 8 et 9.
En déployant son activité thérapeutique :
il guérit un démonique et redonne de la vue aux aveugles ;
puis, il guérit une femme en perte de sang et libère quelqu’un d’un esprit démonique —– qui lui rendait muet.
Après avoir parcouru des villes et des villages, enseignant dans leurs synagogues, prêchant l’évangile du royaume et guérissant toute maladie et toute infirmité, Jésus fut saisi de compassion pour des foules « harassées et gisantes », comme « un troupeau qui n’a pas de berger. — Ces foules, chers amis, « étaient donc la proie de tous ceux qui les exploitent.
Sur le plan politique, ils étaient écrasés par les impôts, ils subissaient la servitude et la violation de leurs droits humains.
Sur le plan religieux, leurs chefs ne leur donnaient pas d’enseignement, pas de soins pastoraux et pas d’aides matérielles.
Au niveau de leur santé, ils souffraient de lèpre, de fièvre, de maladies chronique, de possession démonique, de cécité, de paralysie et de bien d’autres tourments.
Jésus inscrit d’emblée son discours missionnaire dans une logique de compassion envers ces foules sans bergers.
Face aux besoins de ces foules lassées et abattues, Jésus trouve une solution pratique et immédiate : il appelle ses douze apôtres, et les envoie en mission.
- Après la prédication de l’Évangile aux foules, vient le moment d’un discours missionnaire destiné aux Douze apôtres. —
« La moisson est grande mais il y a peu d’ouvrier. Priez donc le maitre de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson. »
Dans la tradition biblique, la moisson évoque le rassemblement attendu d’Israël par le Seigneur (Es 27,12-13) ; le maître de la moisson, comme également le berger, évoque le rassemblement du troupeau dispersé (Ez 34,5). Dans ce contexte, la mission et la moisson, les bergers et les ouvriers deviennent ainsi le signe de l’agir de Dieu pour son peuple.
Frères et sœurs, « De même que le Christ est le premier envoyé, c’est-à-dire missionnaire du Père (cf. Jn 20, 21) et, en tant que tel, son « témoin fidèle » (cf. Ap 1, 5), de même tout chrétien est appelé à être un missionnaire et donc un témoin du Christ. »
l’Église, communauté des disciples du Christ, n’a d’autre mission que celle de témoigner du Christ. Pour ce faire, Timothy Radcliff nous invite à être des témoins courageux. —— A ses yeux, « Si l’Eglise veut être le témoin […], il nous faut nous libérer de la peur. Il y a trop de peur dans l’Eglise – peur de la modernité, peur de la complexité de l’expérience humaine, peur de dire ce qu’on pense, […], peurs de faire des erreurs, de n’être pas approuvé. » Le courage est la vertu dont l’Eglise a le plus urgent besoin pour être témoin de l’Evangile[1].
Frères et sœurs, comme apôtres de Jésus-Christ, nous sommes appelés pour être ensuite envoyés dans le monde, non seulement pour rendre témoignage, mais aussi et surtout pour être des témoins du Christ en paroles et en actes.
Dietrich Bonhoeffer, théologien et pasteur luthérien, dans son livre le Prix de la grâce (Disciple), disait que « Le témoignage des envoyés ne doit pas […] rester dans l’ombre, il doit devenir un témoignage public. »[2] Fin de citation.
L’annonce de l’Evangile ne doit pas être une activité secrète, mais une prédication publique en paroles et en actes.
Les disciples qui ont été appelés et envoyés dans le monde pour être témoin, avaient pour mission de proclamer que le Règne de Dieu s’est approché. Cette proclamation passe par un certain nombre de gestes : guérissez les malades, réveillez les morts, purifiez les lépreux, chassez les démons.
Pour nous aujourd’hui, ces gestes : nous pouvons les entendre comme une parole qui libère, une parole efficace, dynamique qui nous relève.
Mes frères et sœurs, qu’est-ce qu’une mission si ce n’est un témoignage de l’Évangile de la grâce de Jésus-Christ, une parole vivifiante ?
Qu’est-ce qu’une mission si ce n’est le partage, en paroles et en actes, de la bonne nouvelle du salut que nous avons reçue par pure grâce, en Jésus-Christ ?
La mission que Jésus a confié à ses apôtres n’était pas que d’enseigner et de prêcher, mais aussi de guérir.
Le mot grec traduit par « guérissez » peut signifier « soignez, honorez ». En tant que disciple, nous sommes appelés à prendre soin de celles et ceux que Dieu met sur notre chemin.
En guérissant les malades, Jésus rétablit la relation de l’homme, la femme ou l’enfant à son corps, à son âme, à son esprit. Guérir, c’est en effet aider des femmes et des hommes à vivre bien.
Jésus nous envoie en mission pour prendre soin des blessés de la vie, en les traitant avec respect et dignité.
APPLICATION :
Frères sœurs, le récit de « l’envoi des douze » en mission nous appelle à entrer dans la moisson du Seigneur. D’ailleurs, la visée théologique du récit de l’évangile selon Matthieu est claire : « La moisson est grande, il y faut des ouvriers ».
Face au manque d’ouvriers catéchètes pour nos enfants et adolescents, manque de conseillers presbytéraux pour 2024, manque de responsables pour le groupe de scout de notre paroisse, —- il est essentiel que nous priions le maître d’envoyer en son nom assez d’ouvriers, des témoins courageux, dans sa moisson.
Pour conclure, permettez-moi de lire une très belle prière du pasteur Denis Heller tirée dans « Parole pour tous » :
Prions le maître d’envoyer des ouvriers dans sa moisson.
Des ouvriers humbles et fidèles, poussés par l’esprit, soucieux du prochain
Des témoins courageux, serviteurs acharnés de paix et de justice
Des artistes de la gratuité, des virtuoses de la liberté d’aimer.
Prions le maître d’envoyer des ouvriers dans sa moisson.
Des femmes et des hommes prêts à prendre des responsabilités dans nos Eglises
Des catéchètes, des prédicateurs, des visiteurs, des diacres, ardents messagers de son Evangile
Des conseillers attentifs à la vie communautaire et au bien de chacun.
Prions le maître d’envoyer des ouvriers dans sa moisson.
Des jeunes et moins jeunes prêts à servir comme pasteurs et aumôniers
Des théologiens ayant le goût d’articuler foi chrétienne et pensée contemporaine
Des aventuriers de l’Evangile audacieux dans l’exploration de nouvelles missions.
AMEN
Pour répondre au message de la Parole de Dieu, je vous invite à chanter le cantique 36/10 : « Que la moisson du monde est grande » les 3 strophes. (Puis, je vous invite à confesser notre foi chrétienne selon le symbole des apôtres)
Avant de lire les Ecritures, nous prions Dieu pour qu’elles deviennent, pour nous, paroles de vie.
Esprit saint, esprit du Dieu vivant, au moment où nous allons lire les Saintes Écritures, viens nous éclairer afin qu’elles deviennent pour nous, parole de vie, une parole qui nourrit notre foi, afin que nous soyons en mesure de répondre à ton appel. Amen !
Parole d’envoi :
« L’envoi, c’est comme une boussole, pour garder le cap que nous a indiqué Jésus pendant sa vie. Il s’agit pour nous de suivre ce cap, de façon réaliste et adaptée à notre cheminement et à notre contexte, en rectifiant l’itinéraire si l’on s’en éloigne trop, mais de le suivre et de lui être fidèle, car c’est le meilleur moyen d’être fidèle à nous-mêmes et d’accomplir la volonté de Jésus. Jésus dit « comme le père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ».
P 99. CEVAA
Que le Seigneur de la moisson fasse de nous ses envoyés, prêts à témoigner ici et ailleurs, pour l’Évangile de la grâce de Jésus-Christ.
Amen !
[1] Timothy Radcliff p. 98.
[2] P. 178.
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