Cimade – communication de Laurent Schlumberger

La Cimade est une jeune et alerte vieille dame de 80 ans, qui a besoin de vous

Intervention au synode de l’Église protestante unie de France en Région parisienne, 16 novembre 2019

 

 

La Cimade a 80 ans. Fondée en 1939-1940, elle a connu de grandes étapes : l’accompagnement des déplacés et évacués d’Alsace-Lorraine en 1939, les réfugiés européens (espagnols, juifs, etc.) regroupés en camps d’internement, puis la Résistance et la clandestinité pendant la Seconde guerre mondiale, la réconciliation franco-allemande, la décolonisation, l’accueil de réfugiés des dictatures du Tiers-monde (Asie, Amérique latine) et, à partir de la seconde moitié des années 70, l’action face au durcissement quasi-continu de la législation concernant les étrangers (49 lois en 45 ans !),  l’accompagnement notamment juridique et le plaidoyer dans une France et une Europe qui se pensent de plus en plus comme une forteresse assiégée.

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Aujourd’hui, la situation en France est extrêmement dure pour les personnes exilées. Elle est caractérisée notamment par :

  • La volonté de rendre impossible la vie des exilés (comme l’a reconnu lui-même Pascal Brice, ancien directeur de l’OFPRA), en espérant ainsi diminuer leur nombre, ce qui est non seulement injuste mais inefficace.
    Par exemple, la nouvelle carte de paiement attribuée aux demandeurs d’asile ne leur permet plus de percevoir leur maigre allocation mensuelle en espèces, ni de l’utiliser par internet, ce qui complique considérablement et renchérit les paiements. Ou encore, en Ile-de-France il est quasiment impossible d’utiliser les plateformes téléphoniques, saturées, pour prendre rendez-vous et déposer une demande d’asile.
  • La petite musique persistante et insidieuse de la propagande d’État, qui fait délibérément fi des données scientifiques et dit le contraire de ce qui est fait.
    Par exemple : le chef de l’État a déclaré le 26 septembre que « pour continuer à accueillir tout le monde dignement, la France ne doit pas être un pays trop attractif ». « Continuer à accueillir tout le monde », vraiment ? « Dignement », vraiment ? Quant à ce refrain sur l’attractivité, il est particulièrement inexact puisque, en tenant compte de sa population et de son PIB, la France est sous la moyenne des pays de l’Union européenne pour l’accueil des demandeurs d’asile

Les bénévoles et les salariés sont mis à rude épreuve pour accompagner les quelques 110.000 personnes, souvent dans des situations inextricables, accueillies dans les permanences de La Cimade.

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Parmi l’actualité interne du mouvement, notons.

  • Le fort renouvellement de l’équipe dirigeante, notamment le président (il y a 18 mois) et secrétaire général (il y a 5 mois).
  • Le futur renouvellement du marché de la rétention (La Cimade est présente dans 8 Centres de rétention administrative), aux incertitudes nombreuses ;
  • Un audit de la Cour des comptes est en cours. Selon les documents provisoires d’étape, il pourrait décerner un net satisfecit quant à la gouvernance et à la gestion de La Cimade ; mais il pourrait également contester la liberté de parole d’une association qui reçoit des financements publics (ce qui serait très surprenant : songeons par exemple aux partis politiques, aux syndicats, à la Cour des comptes elle-même, etc.).
  • L’élargissement de la base des membres. Le nombre de bénévoles a doublé en 5 ans. La volonté de La Cimade est de poursuivre cet élargissement. Vous-mêmes pouvez devenir membres associés, c’est-à-dire sympathisants actifs selon vos possibilités.

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La Cimade est une alerte et jeune vieille dame !

Elle n’a cessé de s’adapter aux besoins des personnes exilées, en gardant le cap exprimé par sa baseline : « L’humanité passe par l’autre », dont la source et les résonnances évangéliques sont évidentes.

La Cimade a besoin de notre prière, même si elle ne le sait pas toujours. Elle a besoin d’être en lien avec nos Églises locales, même si elle ne le sait pas toujours. Elle a  besoin de nos engagements, si nous voulons qu’elle garde une dimension protestante vivante et significative.

Laurent Schlumberger