La bonne part

 

Comme Jésus était en chemin avec ses disciples, il entra dans un village, et une femme du nom de Marthe l’accueillit dans sa maison. Elle avait une sœur appelée Marie qui s’assit aux pieds de Jésus et écoutait ce qu’il disait. Marthe était affairée aux nombreuses tâches que nécessitait le service. Elle survint et dit : « Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma sœur me laisse seule pour servir ? Dis-lui donc de venir m’aider. » Jésus lui répondit : « Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour beaucoup de choses, mais une seule est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, elle ne lui sera pas enlevée. »

Le texte que nous venons de lire est situé dans le chapitre 10 de l’évangile de Luc. Ce chapitre contient la scène ou Jésus est interrogé sur le plus grand commandement. Puis juste après, c’est la parabole du Bon Samaritain (qui répond à Qui est mon prochain), puis juste après la scène avec Marthe et Marie, laquelle est suivie du texte sur comment prier. Le texte de Marthe et Marie permet donc de creuser la logique des deux commandements et de leur difficile articulation. En effet, comment articuler nos vies entre « tu aimeras Dieu » et « tu aimeras ton prochain, comme toi-même ». Cette articulation s’incarne sur deux figures :
– Marie : relation avec Dieu – écoute, prie, s’ouvre
– Marthe : elle accueille Dieu chez elle, elle sert, elle s’occupe des autres

Notez que Marie comme Marthe illustrent des postures vis-à-vis des commandements qui sont totalement légitimes. Mais les deux se trouvent dans des postures de vie différentes. Marthe et Marie incarnent l’application des commandements de Jésus.

Nous aussi nous vivons au quotidien ces deux postures de vie. Et comme pour chacun d’entre nous, il y a un temps pour tout :

  • Il y a un temps pour écouter, et un temps pour agir
  • Un temps pour s’asseoir, et un temps pour donner à manger
  • Un temps pour prier, et un temps pour servir
  • Un temps pour méditer, et un temps pour partager
  • Un temps pour être Marie, et un temps pour être Marthe
  1. Et à mes yeux ces deux postures de vie sont les manifestations des commandements de Jésus

Pourquoi sommes-nous si mal à l’aise face à l’inconfort et l’inquiétude de Marthe, cette impression de rejet. Pourquoi la ressentons-nous aussi intimement ? C’est à Marthe que nous nous identifions, et la réponse de Jésus nous frustre. Pourtant Marthe fait tout bien. C’est elle qui accueille Jésus, c’est elle qui lui ouvre sa maison, c’est elle qui lui donne du temps pour se reposer et du temps pour parler. La seule caractéristique de Marthe qui profondément me gêne, c’est sa demande, cette  Phrase agacée, culpabilisante : « Seigneur, cela ne te fait-il rien que ma sœur me laisse seule pour servir ? Dis-lui donc de venir m’aider. »

  • Marthe demande pour une autre ce qui est bon pour elle. Or ce qui est bon pour Marthe n’est pas forcément bon pour Marie au moment où elle le demande.
  • Elle demande à Jésus de demander à Marie de faire quelque chose. Et bien de façon générale, demander à Dieu de faire une chose dont on a envie n’est pas la meilleure des postures. Dieu sait souvent mieux ce qui est bon pour Marthe et pour Marie.

C’est là où Marthe passe à côté. Ce n’est pas ce qu’elle fait, c’est l’esprit dans lequel elle le fait. Elle agit bien, mais peut-être pas pour les bonnes raisons. Car nous l’avons tous expérimenté. Agir pour le monde c’est aride, c’est désespérant, c’est décourageant. Ce n’est jamais reconnu. Et nous autres humains encore aujourd’hui nous trainons un appétit de reconnaissance jamais assouvi. Nous n’aurons pas de compensation pour nos efforts, pas de reconnaissance de nos efforts, L’action ne comble pas une vie. Tout au plus l’action comble-t-elle les vides.

Vous avez sans doute dans l’oreille cette fameuse phrase de Paul « Dieu aime celui qui donne avec joie »

C’est là où Marthe ne prend pas la bonne part. Quand elle parle à Jésus, elle ne va pas au-delà de l’action. Elle ne revient pas à la raison pour laquelle elle agit. Et reconnaître cette raison, c’est la bonne part. nous sommes invités à revenir à Dieu, et au plan de Dieu. La bonne part, c’est aimer Dieu avant tout :

  • se relier à une immanence, Je reconnais que j’ai qu’un seul patron, et il est là haut
  • respecter ce que demande Dieu, je prends des décisions dans ma vie en tenant compte de ce qu’il me souffle de bon, que ce soit raisonnable ou déraisonnable, conscient ou intuitif
  • se relier à une fraternité, je considère l’autre avec le respect, avec l’attention et les égards d’un autre représentant de Dieu
  • accepter que ma vie a un sens, pas forcément pour moi, mais pour Dieu

Aimer Dieu c’est ce qui prime, c’est ce qui permet d’aimer son prochain. Le chapitre sur Quel est le plus grand commandement finit sur La bonne part : tu aimeras Dieu donc tu pourras aimer ton prochain. C’est la porte d’entrée. C’est une déclaration de foi en action. La bonne part, c’est d’aimer Dieu en premier. Il sera temps pour Marthe d’apprendre à écouter Dieu et d’agir pour lui donner sens et pour se donner sens également, comme il sera temps pour Marie d’agir pour les autres. Et il est temps pour nous d’accepter la bonne part. d’aimer Dieu, de l’aimer parce que c’est ce qu’il nous demande, de l’aimer parce que ça nous donne sens, que ça nous fait agir, que ça nous fait du bien.

AMEN

 

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