Nous sommes libres !
Bien sûr qu’il faut des caricatures. Il n’est plus temps de tergiverser. Le danger est bien réel de se laisser gagner par la peur des intimidations, des boycotts de Vache qui rit et des rodomontades du président turc.
Parce que l’humour est le plus sûr outil de désacralisation entre nos mains, nous devons nous en servir largement pour railler tout ce qui prétend prendre la place de Dieu dans notre vie : l’argent-roi, la quête de pouvoir, la soif de reconnaissance, les prophètes de toutes obédiences, et y compris voire surtout pour rire de nous-mêmes, de notre goût bien français pour l’insolence et la dérision, de notre propre importance, de nos temples vides et de nos prédications parfois creuses… jusqu’à Dieu lui-même, ou tout au moins les images que nous en avons et les affirmations dogmatiques péremptoires que nous opposons aux autres. Tout est permis, absolument tout (1 Co 10,23). Il n’y a pas de restriction qui tienne. Il n’y a pas de « oui… mais ».
Nous sommes libres. Entièrement. Parce que Christ nous a libérés, il est nécessaire et utile de profaner – au sens de rendre profane – tout ce qui prétend être « sacré » dans le monde, qui voudrait qu’on le mette à part, sous cloche de protection, sous couvre-feu. Nous sommes même libres de ne pas faire tout ce que nous pourrions faire. Notre liberté va jusque-là. Nous pourrions caricaturer des enfants autistes. Et nous pouvons aussi choisir de ne pas le faire. Parce que nous sommes libres.
Libres de nous restreindre, de poser un frein à notre puissance, à notre volonté, à notre envie d’en découdre. Cela s’appelle la responsabilité. Cela se nomme l’éthique. Je choisis librement de ne pas faire tout ce que je pourrais faire. Pourquoi cela ? Peut-être pour ne pas être une occasion de scandale pour le plus petit de mes frères (Mt 18,5). Peut-être aussi par estime pour une foi différente de la mienne. Peut-être par amour tout simplement. Parce qu’il n’y a pas de liberté sans amour. Nous sommes ici au cœur de la foi protestante.
Publié le 27 octobre 2020 Par Samuel Amedro