« L’heure est venue… » Méditation pour un temps de confinement
Quant
à nous, frères, séparés de vous pour quelques temps, loin des yeux mais
non du cœur, nous avons un tel désir de vous revoir que nous avons
redoublé d’efforts pour y parvenir. En ces temps de confinement, il est
facile de s’identifier à ces quelques mots de la main de l’apôtre Paul
pour les chrétiens de la ville de Thessalonique (1 Thessaloniciens 2,17)
: la séparation contrainte, imposée par les événements, l’affection qui
abolit et transcende la distance, le vif désir de se revoir grandissant
en proportion du manque ressenti et des obstacles à surmonter, les
efforts à faire pour préserver, entretenir voire même faire grandir ce
lien qui devient ainsi le fruit du soin particulier que nous en prenons…
Tout y est et correspond parfaitement à ce que nous ressentons. L’heure
est venue de « faire » communauté au sens fort du terme en prenant soin
les uns des autres par-delà la distance et la séparation.
Dans
le même temps, des vents contraires nous poussent presque inexorablement
contre notre volonté dans une direction opposée. Comme le dit le
professeur Gilbert Deray de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris : «
Je n’ai jamais vécu un tel degré d’inquiétude pour une maladie
infectieuse et d’ailleurs pour aucune autre. (…) Je suis inquiet que ce
minuscule être vivant [i.e le virus] ne fasse que dévoiler les immenses
fractures et fragilités de nos sociétés. Les morts qui se compteront par
millions seront ceux de l’affrontement des individus dans
l’indifférence totale de l’intérêt collectif. » Vols de masques et de
gels nettoyants, stocks de nourriture indécents dans notre société
d’abondance, rixes dans les supermarchés et polémiques politiciennes
dans les médias…
Tout y est pour révéler la part sombre de barbarie,
d’égoïsme et de violence qui sommeille en chacun. L’heure est aussi
venue de regarder en face notre humanité, sans faux-semblants, sans
notre masque bien policé par la vie sociale.
S’il peut paraître difficile d’échapper à cette ambiguïté, il est au moins envisageable de l’interroger à partir de ce qui fonde notre vie et qui fait s’exclamer l’apôtre : Sans l’amour, je ne suis rien (1 Corinthiens 13,2) ! De fait, ce lien qui nous unit est fondamentalement un lien spirituel indispensable à notre survie.
En vérité, l’heure est venue pour nous – et c’est maintenant – d’en prendre pleinement conscience.
Pasteur Samuel AMEDRO – Mercredi 18 mars 2020